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[#PRÉSIDENTIELLE2017] Au coeur de la cité Curial, dans le XIXe arrondissement de Paris, les électeurs ne se bousculent pas pour aller voter en cette journée de second tour de l’élection présidentielle. Beaucoup estiment ne pas avoir eu le choix : ils ont glissé un bulletin de vote par défaut pour éviter une victoire de l’extrême droite. Reportage.

Bureau de vote 43. Rue Colette Magny, dans le XIXe arrondissement de Paris, au coeur de la cité Curial. Il est 10h30. On ne peut pas dire que le président du bureau et ses assesseurs soient surchargés par une foule de votants. L’agitation se joue surtout sur les télévisions pour le moment. Un silence presque religieux est parfois perturbé lorsque un votant fait son entrée dans l’école maternelle, quand ça n’est pas par les gouttes de pluie.

À 22 ans, Sofiane Kaci, en service civique, est venu accompagné de sa mère, Lila, et de sa petite soeur, pas encore en âge de participer à cette grand messe. Le vote ici est presque une affaire de famille. Leur cible : la candidate du Front national. « Il faut appeler un chat un chat : Marine Le Pen est comme son père. Elle s’attaque à l’immigration, et rien d’autre », lâche la mère au foyer, qui vit dans le quartier depuis 23 ans. Elle est persuadée que la France ne serait pas la France sans ses immigrés.

« On ne fait que subir »

Une tendance générale se dégage dans ce bureau de vote. La grande majorité des électeurs interrogés avouent volontiers qu’ils ne votent pas pour un candidat, un projet, un programme, mais contre. C’est le cas de Sandy, venue avec son fils Noa. À la sortie du bureau, la comptable de 36 ans n’est pas là par plaisir, dit-elle sans détour. Elle n’a pas l’impression d’avoir eu le choix dans ce second tour. « On ne fait que subir, explique-t-elle Cette campagne était horrible, catastrophique. Vivement que tout cela se termine ».

Même sentiment chez Marie-Aude Voudour, 68 ans : « J’en ai ras les pâquerettes. Je suis arrivée à saturation. La campagne était minable. On vaut mieux ». Les deux femmes pensent surtout à l’avenir des prochaines générations. « Certes, mes enfant sont encore jeunes, mais c’est maintenant que tout se joue », souligne de son côté Sandy.  « J’ai peur pour mes enfants », appuie pour sa part la retraitée.

« Jean-Marie Le Pen en 2002, c’était vraiment une surprise. Cette fois, on s’attendait à voir Marine Le Pen au second tour »

Lou Gasparini, étudiante de 19 ans, et son amie votent pour la première à une élection présidentielle. « C’est émouvant mais en même temps hyper bizarre. J’ai l’impression d’avoir une énorme responsabilité », rapporte la première. Une responsabilité dont ne tiennent pas en compte les absentationnistes selon les deux jeunes. « J’ai des amis de 17 ans. Ils ne sont que spectateurs. Ça me fait mal de ne pas les voir voter ». Lou a voté pour Jean-Luc Mélenchon, le plus proche de ses convictions. Aujourd’hui, elle a choisi de voter Macron et met en garde ses congénères : « Faites gaffe et aller voter ».

Quelques pas plus loi, Guy, enseignant-chercheur en Histoire de 45 ans, n’a pas hésité une seconde. « Encore aujourd’hui, nombreux risquent leur vie pour notre droit », rappelle-t-il. Et se remérmore de sa gueule de bois de 2002. « Jean-Marie Le Pen finaliste, c’était vraiment une surprise à l’époque, raconte-t-il. Cette fois, on s’attendait à voir Marine Le Pen au second tour depuis au moins un an. La campagne a commencé bien avant. Les résultats du premier tour ne sont qu’une affirmation. Et Macron n’avait pas le choix. Il devait l’affronter au débat. Maintenant, il a besoin de faire ses preuves ». Et conclut en citant Jean Cocteau : « Mon pessimisme n’est qu’une forme de l’optimisme ».

Yousra GOUJA

Crédit photo : Amel BOULAKCHOUR

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