Sur les coups de midi, une centaine de personnes se retrouvent à la Bourse du travail, près de la place de la République à Paris. Des drapeaux palestiniens et sud-africains font face à l’assistance au-dessous d’une large banderole floquée : « L’Assemblée des quartiers ».
L’Assemblée des quartiers se veut autonome et indépendante des partis et forces politiques traditionnels. Son lancement, ce samedi 27 avril, réunit différents collectifs et acteurs bien connus des quartiers populaires pour leurs combats contre les violences policières ou les inégalités. L’événement compte notamment Youcef Brakni, du collectif Adama, Zounia Meddour, militante associative et politique, Salah Amokrane, coordinateur général de l’association Tactikollectif, à Toulouse ou encore Mohamed Mechmache, fondateur de la coordination nationale Pas sans nous. L’ambition de cette Assemblée est posée d’emblée : « Exister collectivement, s’engager politiquement ».
« Parce que nous refusons de déléguer notre pouvoir à ceux qui ne nous représentent pas, nous appelons à la création d’une Assemblée des quartiers qui sera un espace d’affirmation à la fois politique, sociale et culturelle… », appellent les fondateurs.
La jeunesse de nos quartiers mérite notre engagement total
Dans cette optique d’union, la jeunesse tient un rôle central. Dans leur journal, les fondateurs écrivent : « La jeunesse de nos quartiers mérite notre engagement total, car c’est de notre avenir à tous qu’il s’agit. »
Cette initiative remonte en réalité à l’élection présidentielle de 2022. À l’époque, le collectif On s’en mêle avait été créé pour faire entendre les revendications des quartiers. Pour y parvenir, il avait soutenu la candidature de Jean-Luc Mélenchon, le chef de la France Insoumise (LFI). Ce dernier avait largement profité du vote des quartiers.
À l’issue du scrutin présidentiel, un constat a conduit les militants des quartiers à dépasser le collectif On s’en mêle vers un cadre plus large de réflexion et d’action.
L’importance de l’indépendance
Pour lancer la journée, chacun des membres fondateurs de l’Assemblée des quartiers présente sa vision et son ambition du projet. Youcef Brakni, membre du Comité Adama, entend ancrer cette dynamique dans la durée: « Ce qui va compter dans les années à venir, c’est une organisation forte. L’important, c’est de ne pas être isolé. »
« Nous voulons créer un espace de formation dans différents domaines. Une sorte d’école des quartiers populaires », présente Youcef Brakni. Un outil pour transmettre l’histoire des luttes locales aux plus jeunes, mais aussi former des militants et des cadres politiques.
« On ne demande l’autorisation de personne ! Nous sommes des citoyens à part entière ! lance Almamy Kanouté, travailleur social et figure du mouvement. Le seul moyen de se faire entendre, c’est le rapport de force ! Et c’est au niveau politique qu’il faut le mettre en place. »
Il faut que celles et ceux qu’on n’entend pas prennent le pouvoir !
Omar Slaouti, militant antiraciste, complète : « Il faut que celles et ceux qu’on n’entend pas prennent le pouvoir ! » Pour les fondateurs de l’Assemblée des quartiers, s’emparer du pouvoir ne se limite pas aux élections, mais concerne toutes les institutions.
Pour Youcef Brakni ce rassemblement n’est pas un meeting politique. Il s’agit de susciter un débat et une réflexion des participants. Cette discussion s’articule autour de trois axes essentiels : la formation, la transmission et la solidarité.
Les prises de paroles s’enchaînent au micro. Chadia, militante à Stains, insiste sur l’importance de l’indépendance par rapport aux politiques : « On va nous raccoler ! Il faut réfléchir à la manière dont on va mobiliser dans nos quartiers. Nous devons nous concentrer sur le travail de terrain. On en a marre de ces politiques déconnectées ! », lance-t-elle.
Myriam embraye : « Il faut fédérer ! Nous contribuons à la richesse de la France ! s’exclame-t-elle. Nous sommes légitimes ! Nous devons dépasser nos peurs ! »
Structuration de l’Assemblée des quartiers
Dans un premier temps, un comité de pilotage aura la charge d’organiser l’assemblée des quartiers pendant un an. Il se structurera progressivement avec des groupes de travail.
L’objectif consistera à créer un Parlement des quartiers qui rassemble des représentants des assemblées locales. À ce stade, il ne s’agit encore que d’une proposition de structuration qui sera amenée à évoluer. Les participants sont invités à s’investir dans cette étape pour la rendre la plus opérante possible. Des rendez-vous seront pris dans ce sens, notamment au niveau régional.
Hervé Hinopay
Photo Thidiane Louisfert