Pour les villes les plus pauvres, la ceinture est d’ores et déjà serrée jusqu’aux derniers crans. La précarité s’y incruste et progresse et avec toutes les problématiques qui en découlent. Derrière les lignes budgétaires que les parlementaires vont être amenés à examiner dans les prochaines semaines, il y a des vies. Celles de personnes qui, littéralement, ne mangent pas à leur faim. Une précarité alimentaire qui s’aggrave comme en témoignent les études sur le sujet. On pourrait également citer les questions de logement, d’accès aux soins, d’éducation…

Pourtant, le projet de loi de finances présenté par le gouvernement au Parlement invite à des coupes drastiques dans le filet de sécurité sociale déjà mal en point de ce pays. Pour les quartiers populaires, l’addition s’annonce salée. L’exécutif prévoit en effet une baisse des crédits alloués à la politique de la Ville de l’ordre de 14 %, c’est-à-dire de 90 millions d’euros. Ce budget passerait ainsi de 639,5 à 549,5 millions d’euros.

Des coupes aux conséquences drastiques

À ce coup de rabot s’ajoutent les baisses des crédits aux collectivités locales qui s’établiraient « entre 8,5 et 9 milliards d’euros pour 2025 », estime Philippe Laurent, vice-président de l’Association des maires de France (AMF) et maire de Sceaux (Hauts-de-Seine) sur Mediapart.

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Pour les élu.es des quartiers populaires, l’annonce de ces baisses n’a pas surpris, mais a conforté un sentiment d’abandon présent depuis les premières heures de la présidence d’Emmanuel Macron. « On a idéologiquement des gens qui ne portent aucun intérêt aux quartiers populaires. Le fait qu’il n’y ait pas de ministère de la Ville n’est pas un oubli », pestait dans nos colonnes le maire de Grigny, Philippe Rio, il y a moins d’un mois.

En effet, à l’annonce du gouvernement de Michel Barnier, l’exécutif ne comptait pas de ministre chargé de la politique de la Ville. C’est seulement le 10 octobre que la ministre du Logement et de la Rénovation urbaine, Valérie Létard, s’est vu confier le portefeuille de la ville. Un « oubli » qui s’est fait dans une indifférence médiatique et politique quasi générale.

De l’oubli et du mépris

Avec la crise sanitaire, les quartiers populaires, dont la Seine-Saint-Denis, ont payé un lourd tribu avec une surmortalité et des conséquences économiques et sociales qui se font encore sentir. Là aussi, l’indifférence domine. Un reproche qu’on ne peut pas appliquer à l’attention accrue prêté aux révoltes urbaines de l’été 2023. À cette période, les médias et les politiques étaient intarissables. Ces derniers rivalisant de propositions chocs, comme celle de sanctionner les mères isolées.

Mais même ce pic d’attention médiatique et politique a fini par s’éteindre. Après les révoltes urbaines, un plan ministériel avait été arraché par les élu.es locaux sur le volet social et les mesures peinent toujours à être appliquées. Au-delà de l’oubli, le sociologue, Thomas Kirszbaum, évoque une politique délibérée. « L’idée s’est installée dans une frange de la société que l’État en ferait trop pour une population suspectée de se complaire dans l’assistanat, tout en n’aimant pas la France », observait-il dans une récente interview au Bondy blog. Le résultat est sous nos yeux.

Héléna Berkaoui

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