Le collectif Touche Pas à ma ZEP organisait mardi 3 janvier une cinquième journée de grève Place de la République, pour protester contre la réforme du dispositif d’éducation prioritaire. Malgré la rentrée scolaire et les conditions climatiques glaciales, plus de 90 lycées de 14 académies différentes se sont mobilisés partout en France.

« Peut-on parler d’égalité ? », « Zap pas ma ZEP », « Sauvons l’éducation prioritaire ». Sur les banderoles, les slogans reflètent la colère des manifestants. Au pied de la statue des frères Morice, quelques enseignants chantent en cœur que « dans la France de 2017, les ZEP sont mortes ce soir ». La cause de leur mobilisation ? En 2014, le gouvernement a décidé de retirer aux lycées le statut de « Zone d’éducation prioritaire » pour recentrer le dispositif, créé en 1980, sur l’école primaire et le collège. « Le gouvernement part du principe que si les résultats sont insuffisants, c’est parce que le système actuel ne fonctionne pas, analyse Inès, professeur d’anglais au lycée polyvalent Simone-de-Beauvoir de Garges-lès-Gonesse. Nous pensons qu’au contraire, il faut le renforcer pour obtenir des résultats ».

Autre source de tension, le manque de clarté de la liste des établissements classés en zone d’éducation prioritaire. « Il y a des dizaines de cartes différentes. Le gouvernement entretient volontairement ce flou pour éviter les protestations », s’agace Charlotte Vanbesien, professeur de lettres et d’histoire en lycée professionnel à Saint-Denis et secrétaire académique de la CGT Educ’action académie de Créteil.

Cette cinquième journée d’action en faveur des lycées dans des zones d’éducation prioritaire a réuni plus d’une centaine de professeurs grévistes d’Île-de-France à Paris et plus de 100 à Marseille. Une assemblée générale à l’appel du collectif Touche pas à ma Zep, a voté quelques heures avant le rassemblement la poursuite de la grève jusqu’à jeudi et une manifestation à Paris. Si la ministre de l’Éducation ne répond pas à leurs revendications, il n’y aura « pas de rentrée en septembre », menace Touche pas à ma ZEP.

« Plus de moyens et d’effectifs » pour mieux accompagner les élèves

prof

Sandrine Bourret et Yasmina Sakly

Ces manifestants – enseignants, représentants syndicaux mais aussi lycéens – partagent les mêmes revendications. « Nous demandons plus de moyens et d’effectifs pour l’éducation prioritaire, déclare Sandrine Bourret, professeur de philosophie au lycée Jean-Macé de Vitry-sur-Seine. Cela nous permettrait de maintenir un seuil maximum de 30 élèves par classe et de garantir un accompagnement individuel à nos élèves ».

Autre revendication : les manifestants souhaitent conserver des heures en demi-groupes, qui permettent aux enseignants d’accorder du temps à chaque élève. « Certains sont timides et n’osent pas prendre la parole devant des classes de 30 élèves, déplore Marie, qui enseigne l’espagnol au lycée Marx-Dormoy de Champigny-sur-Marne. Au final, seuls les meilleurs s’expriment, ce qui creuse les écarts entre les élèves ». Agacée par une réforme qu’elle juge « insupportable », elle regrette que « les Zones d’Éducation Prioritaire, qui devaient permettre davantage d’égalité, soient oubliées ».

Élèves et professeurs main dans la main

Avant de venir manifester, ces professeurs ont expliqué à leurs élèves les raisons de leur mobilisation. « Ils comprennent tout à fait les conséquences que cette réforme pourrait avoir sur la qualité de l’enseignement et cela les inquiète », poursuit Sandrine Bourret. « L’une de mes élèves me confiait qu’elle se sent abandonnée par l’État« , ajoute Yasmina Sakly, qui enseigne l’espagnol au lycée Jean-Macé.

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Camara Sirafing et Rebecca Jean-Louis, élèves en terminale ES au lycée Maurice-Utrillo (Stains)

Quelques mètres plus loin, des élèves de Terminale du lycée Maurice-Utrillo de Stains ont tenu à se joindre au rassemblement. « Nos professeurs nous ont expliqué la situation et nous avons voulu nous mobiliser, justifie Camara Sirafing, élève de Terminale ES. Cette grève, c’est surtout pour nous qu’ils la font, alors c’est normal de les soutenir ». A ses côtés, sa camarade Rebecca Jean-Louis redoute de voir son lycée « oublié » s’il perd son statut de ZEP. « Le gouvernement va créer des ghettos scolaires. Nous demandons simplement à pouvoir étudier dans de bonnes conditions ».

Maéva LAHMI

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