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« La lutte Tzigane est à l’intersection parfaite entre la lutte des classes et la lutte des races », développe Saimir Mile, représentant de l’association La voix des Rroms dans une salle du palais Bourbon. Jeudi 19 septembre, Ersila Soudais, députée LFI de la 7ᵉ circonscription de Seine-et-Marne, a tenu une conférence de presse sur l’antitsiganisme avec les représentants de cinq associations de lutte contre l’antitsiganisme.

La lutte contre l’antitsiganisme regroupe la lutte de tous les citoyens au mode de vie itinérant et les Rroms. À l’Assemblée nationale, les représentants ont témoigné de l’invisibilisation médiatique du sujet et des dangers encourus pour ses victimes. Les principales difficultés rencontrées sont liées à la scolarisation des enfants ou aux difficultés à s’installer dans une ville qui ne respecte pas les normes d’accueil.

Les Tsiganes sont régulièrement la cible d’attaques racistes, verbales et physiques. Ersila Soudais dénonce ce racisme banalisé au sein même de l’Assemblée nationale, dans la bouche de certains parlementaires.

« Nous allons faire du procès d’Angela Rostas le procès de l’antitsiganisme »

Les associations font état d’une hausse des actes et propos antitsiganes. Une affaire en particulier a marqué les esprits. Angela Rostas, mère de 3 enfants et enceinte de 7 mois, a été tuée d’une balle dans l’abdomen le 22 février 2024 devant son mobile-home dans la commune de Chênex.

Un drame qui a tardé à être médiatisé et dont la dimension raciste n’a été que très peu évoquée. « L’antitsiganisme passe toujours sous les radars médiatiques », regrette Ersila Soudais. « On voit l’intention raciste de cet acte. Nous allons faire du procès d’Angela Rostas le procès de l’antitsiganisme », dénonce Saimir Mile de La Voix des Rroms.

« Aujourd’hui, des propos comme « Hitler n’en a pas tué assez » restent impunis »

« Aujourd’hui, des propos comme « Hitler n’en a pas tué assez » restent impunis », regrette Saimir Mile. Il fait ici référence aux propos tenus par le maire de Cholet, Gilles Bourdouleix, dont la condamnation avait été annulée par la Cour de cassation.

Un constat qui pousse la députée LFI à vouloir œuvrer à des mesures plus fortes « pour faire reculer l’antitsiganisme » avec les premiers concernés. Parmi les premières propositions, celle de renommer le groupe d’étude « des gens du voyage » en groupe d’étude sur l’antitsiganisme.

Par ailleurs, Ersila Soudais souhaite inscrire la journée du 2 août comme journée nationale des victimes du génocide Tsiganes entre 1939 et 1945. Elle entend porter une proposition de résolution visant à faire reconnaître la responsabilité de l’État français dans le génocide tsigane.

« L’antitsiganisme est une forme de racisme et il doit être sanctionné comme tel », déclare Ersila Soudais. Un racisme qui imprègne toutes les couches de la société, jusqu’au plus haut niveau. La députée rappelle ainsi la déclaration de l’ancien Premier ministre, Manuel Valls, en 2015. « La proximité de ces campements provoque de la mendicité et aussi des vols, et donc de la délinquance. Les Roms ont vocation à revenir en Roumanie ou en Bulgarie », avait-il déclaré.

« Nous respectons le mode de vie des sédentaires, nous souhaitons le même respect »

Émile Cheitz, représentant de l’association familiale des gens du voyage d’Île-de-France, a partagé le fait qu’il trouve que son mode de vie dérange de plus en plus de monde. Les communes ne facilitent pas leur installation. « On nous a même dit “on peut peut-être vous mettre en cité”. Nous respectons le mode de vie des sédentaires, nous souhaitons le même respect. » La loi Besson adoptée en 1990 régit l’accueil des “gens du voyage” par les communes ; une commune de plus de 5 000 habitants doit obligatoirement prévoir des aires d’accueil aménagées pour permettre un séjour dans des conditions décentes. Dans les faits, cette loi n’est pas totalement respectée et souvent contournée.

« On met ce qu’on considère comme étant des déchets à côté des déchets », dénonce Ersilia Soudais au sujet des conditions d’accueil. Émile Cheitz déplore que les Tsiganes sont souvent pointés du doigt et associés à de la délinquance. Ils se retrouvent régulièrement face à un rejet des résidents sédentaires d’une commune, parfois appuyé par le maire de la ville.

« Le pire, c’est l’incitation à la haine venant de maires »

Le racisme antitsigane est banalisé, notamment sur les réseaux sociaux. Les associations dénoncent des vidéos circulant sur internet mettant en scène des résidents sédentaires des communes qui s’en prennent aux Tsiganes.

« Un agriculteur fou furieux a pris son tracteur pour rouler sur une caravane », illustre Saimir Mile. Les associations ont également pointé du doigt l’inaction des tribunaux quant aux questions d’incitation à la haine. En mars 2019, une rumeur affirmait que « des Rroms en camionnettes blanches enlèvent des enfants » en Île-de-France. À la suite de quoi des Roms avaient été violemment pris pour cibles en Seine-Saint-Denis.

« Plus personne ne doit être oublié dans la lutte antiraciste »

Cette lutte s’inscrit dans un paysage plus large des luttes antiracistes. Pour faire valoir la lutte contre l’antitsiganisme, il existe des solutions concrètes aujourd’hui. À commencer par la mise en application des lois déjà existantes qui régissent les aires d’accueil. Lutter contre le racisme environnemental et réfléchir à des solutions écologiques et low-cost pour améliorer les conditions d’accueil des familles itinérantes. La députée de Seine-et-Marne annonce que des groupes de travaux parlementaires seront organisés avec les associations pour porter des revendications et lutter contre ce racisme débridé.

Sarah Bouchamama

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